Rentrer un soir d’hiver enchanté rose
(pas assez de fauteuils pour allonger la fatigue)
et du lit regarder la nuit s’installer en pensant
à des vieilles expressions comme le soir se penche
à l’horizon la couleur se dissout dans une autre couleur :
il est dans la nature de l’œil de se reposer dans le ciel.
Pourquoi la pensée du monde harcèle encore le ciel
désert ? Parmi le possible il y a un rétrécissement,
comme un noircissement si les perruques dansent
flambantes à l’horizon. Un retour de pendule géant :
les jours de H étaient plus longs que les nôtres,
ainsi il suffisait d’attendre le retour si long si
rapide de son gros pendule muni de la fameuse
et terrifiante grande hache. Notre oubli, sa ruse,
et tout un tas d’astres déclinants dans le ciel trop
constellé !
Nous souffrons mal parce que nous n’avons pas encore mal,
pensais-je en regardant la ville basculer, ses fenêtres jaunir,
les reflets s’enlacer. Mais nous penserons plus mal
encore, nous aurons fini. je regardais la lune, croissant plus
blanc que blanc sur un ciel de mille et une nuits alangui
si réel qu’il semblait hors de ce réel, coquetterie
incompréhensible posée, déconnectée comme un songe
au milieu de la poitrine. La nuit avait envahi la pièce et
seuls brillaient la lune, mon écran la ville et leurs quelques
fenêtres. Ces jours les yeux frisaient la contracture, ces
jours les yeux crissaient comme des dents sur la toile.
Marie Fabre, Love Zibaldone, Ed. L’arachnoïde
Bien à vous.
Géraldine